DALO, le droit des étrangers en pointillé ?
Communiqué France Terre d’Asile
« Le "droit opposable au logement" ne doit pas être reconnu à tous les étrangers présents en France. Il va de soi que les "sans papiers" ne doivent pas y avoir accès. Je ne souhaite pas, non plus, que tous les étrangers en situation régulière y aient droit. S’ils sont arrivés récemment en France, ils doivent encore faire la preuve de leur intégration. Pour moi, seuls les étrangers parfaitement intégrés, titulaires d’une carte de résident de dix ans, auraient vocation à bénéficier du "droit au logement opposable" au même titre que les Français. »
Il va sans dire que cette déclaration du candidat de l’UMP à l’élection présidentielle, prononcée le 11 janvier dernier, aurait pu faire débat, mais dans l’atonie générale de ces dernières semaines, rien ou presque ne semble plus important que de s’intéresser à la fiche des renseignements généraux de Monsieur Rebelle ou au relevé d’empreinte ADN après le vol d’un scooter. La question du vivre ensemble, des droits des personnes étrangères en situation régulière, du sens que l’on veut donner à une politique d’intégration relèvent pourtant de l’intérêt général.
La récente loi Ceseda a multiplié les titres de séjour précaires, en général d’un an. Elle a allongé la durée de stage nécessaire pour chaque catégorie de rejoignant et restreint la possibilité de pouvoir obtenir la carte de résident de dix ans. En réalité, seules les personnes reconnues réfugiées statutaires ont aujourd’hui un accès de plein droit à la carte de résident de dix ans, soient environ 10 000 personnes par an. Au passage, il conviendra le temps venu d’en étudier toutes les conséquences sur le maintien de ces personnes dans certains dispositifs.
La proposition du ministre d’État mérite donc d’être discutée puisqu’elle exclue d’emblée 90 % des étrangers en situation régulière qui rejoignent la France chaque année. Car la carte de séjour temporaire, si elle a pour fonction déclarée de faire mériter la France aux impétrants et de donner les signes de leur intégration, a aussi un effet terrible sur le terrain. Avec une carte d’un an, le CDD devient la règle pour les employeurs, le logement social est quasiment interdit et le prêt bancaire impossible. Autrement dit, nous rentrons là dans le cercle pervers de la précarité et la carte de séjour d’un an en est le marqueur pour les étrangers. Ce d’autant plus que le retrait du titre de séjour précaire peut intervenir en cas de défaut d’intégration, en cas de non suivi du Contrat d’accueil et d’intégration. L’on me dira que la République ce sont des droits et devoirs. Et j’applaudirai. Pour ajouter immédiatement que dans ma conception elle ne saurait organiser durablement la différenciation des droits sociaux entre Français et étrangers réguliers sans se renier et sans faire courir à la Nation un véritable risque d’implosion.
Alors au-delà de la discussion sur la portée réelle de la loi sur le droit au logement opposable (DALO), il est urgent de réclamer une véritable sécurisation du parcours de séjour pour les étrangers et le rétablissement de l’obtention automatique de la carte de résident pour les conjoints de Français et pour les « rejoignants » dans le cadre du regroupement familial. Négliger aujourd’hui cet aspect est assurément la promesse de graves difficultés pour demain !